« Super aliments », super arnaque ?

Des « super aliments » aux noms exotiques ont envahi les rayons des magasins bio, et la publicité leur attribue toutes les vertus imaginables :

  • L’algue klamath amĂ©liorerait mĂ©moire et concentration
  • Le maca stimulerait la vigueur sexuelle
  • Le nopal ou figuier de barbarie aiderait Ă  contrĂ´ler le diabète
  • L’acaĂŻ, les graines d’ucurum seraient de puissants antioxydants
  • Sans parler des baies de goji, antioxydantes elles aussi, et qui auraient permis Ă  l’herboriste chinois Li Ching-Yuen de vivre 256 ans…

Mais sont-ils vraiment aussi « super » qu’on nous le raconte ?

Il est vrai qu’ils sont consommés depuis longtemps un peu partout sur le globe par des populations « traditionnelles » : la poudre de maca, par exemple, est connue depuis toujours sur les hauts plateaux des Andes, l’acaï est un petit fruit commun en Amazonie et les graines de chia étaient déjà appréciées des Aztèques.

Label « aliment authentique » garanti. Mais pour le reste ? Il faut y regarder de plus près…

  • Les graines de chia sont indiquĂ©es comme Ă©tant 15 fois plus riches en magnĂ©sium que le brocoli. Vrai. Mais pour cela, il faut en manger 100 g par jour. Une quantitĂ© qui vous assure une diarrhĂ©e carabinĂ©e (Ă  cause de leur richesse en fibres).
  • Le cacao cru contient de grandes quantitĂ©s d’acide phytique, qui bloque l’absorption des minĂ©raux dans l’organisme (Ă  tel point que la consommation importante d’acide phytique est une cause majeure de dĂ©nutrition dans certains pays).
  • Certains sont riches en phosphore, un minĂ©ral dont nous ne manquons pas dans l’alimentation en gĂ©nĂ©ral. Pire, de rĂ©centes Ă©tudes, menĂ©es sur plus de 10 000 personnes, ont montrĂ© que plus on consomme de phosphore, plus on augmente son risque de cancers, mais aussi de dĂ©cès, toutes causes confondues [1]  [2].
  • L’engouement pour le maca ou l’açaĂŻ a Ă©galement des rĂ©percussions dramatiques sur la santĂ© des populations qui les cultivent. Les tribus d’Amazonie ont vu le prix de l’acaĂŻ multipliĂ© par 60, et ne peuvent plus en manger. Idem pour le quinoa, devenu inabordable pour les Boliviens.

Alors, ces super aliments, une super arnaque ?

Comme tout aliment, il est probable que les baies de goji ou l’algue klamath possèdent de vĂ©ritables bĂ©nĂ©fices sur la santĂ©. Mais ils attendent toujours d’être dĂ©montrĂ©s par la science.

Surtout, ils ne doivent pas faire oublier les vrais super aliments qu’on trouve en bas de chez nous, moins chers, et dont les effets positifs sont avérés.

L’ail : N°1 toutes catĂ©gories confondues

L’histoire raconte que le grand-père d’Henri IV lui frotta les lèvres d’une gousse d’ail à sa naissance pour lui donner force, vigueur, et le prémunir contre les maladies. Le surnom du « Vert Galant » que le bon roi Henri dut à son appétit sexuel et à sa force vitale montre que la méthode a fonctionné !

La science actuelle ne dit pas autre chose.

L’ail est efficace d’abord sur le plan cardiovasculaire : sa consommation quotidienne a un effet marquĂ© sur les taux de cholestĂ©rol qui baissent rapidement, ainsi que les taux de triglycĂ©rides [3]. On constate aussi une amĂ©lioration de la souplesse des vaisseaux et une baisse de la pression sanguine [4].

L’ail est aussi actif sur la vigueur du système immunitaire : s’il est consommĂ© rĂ©gulièrement, il peut diminuer le risque de rhumes et d’infections de plus de 70 % [5]  [6] !

Pour tirer au mieux parti des bĂ©nĂ©fices de l’ail, il faut l’Ă©craser et le laisser reposer Ă  tempĂ©rature ambiante pendant une bonne demi-heure avant de le cuire : ce dĂ©lai va permettre aux enzymes de l’ail de donner naissance Ă  l’allicine, la substance active principale de l’ail [7].

Le brocoli : légume anti-âge (et sympathique)

Le brocoli est un légume à la tête « sympathique », ressemblant à un petit arbre, qui fut introduit en France par Catherine de Médicis, gastronome d’origine italienne et accessoirement reine de France.

Il est riche en lutĂ©ine et en zĂ©axanthine, deux pigments qui sont utilisĂ©s par nos yeux pour se protĂ©ger des mĂ©faits du soleil et du vieillissement (en particulier la DMLA, dĂ©gĂ©nĂ©rescence maculaire liĂ©e Ă  l’âge), il est aussi riche en diverses molĂ©cules dont les effets anticancer (sein, prostate) sont bien dĂ©montrĂ©s, aussi bien en prĂ©vention qu’en traitement [8]  [9].

Le brocoli a aussi de puissantes propriĂ©tĂ©s dĂ©toxifiantes, en facilitant l’Ă©limination des polluants de notre organisme [10].

Le brocoli se consomme cru ou lĂ©gèrement cuit Ă  la vapeur (la cuisson dans l’eau dĂ©truit rapidement la majoritĂ© des substances intĂ©ressantes). On peut amĂ©liorer l’absorption de ces substances en mâchant consciencieusement le brocoli (la dĂ©coupe par les dents active des enzymes qui activent certaines molĂ©cules du brocoli) et en lui ajoutant un filet d’huile d’olive (ou en mangeant le brocoli cru accompagnĂ© d’une vinaigrette maison).

L’oignon, ami fidèle

Les amis de l’oignon me feront remarquer qu’il est sympathique lui aussi, et qu’il n’y pas de raison de lui témoigner moins d’amitié qu’au brocoli. C’est tout à fait vrai, tant sont nombreuses ses vertus démontrées par la science.

L’oignon est une source très importante de flavonoïdes et en particulier de quercétine, qui joue un rôle bénéfique dans la santé des vaisseaux sanguins et du système immunitaire en calmant les réactions allergiques [11]  [12].

Son apport en molécules soufrées, qui lui confèrent la capacité de faire pleurer quand on le coupe, est considéré comme la source de ses effets anticancer : manger même un seul oignon par semaine diminue significativement les risques de cancer du tube digestif, du côlon et des organes reproducteurs [13].

Ces mĂŞmes molĂ©cules aident aussi l’organisme Ă  Ă©liminer naturellement les polluants et les mĂ©taux lourds qui s’accumulent dans nos cellules [14]. Les bĂ©nĂ©fices sont maximum en mangeant un oignon par jour. Pour optimiser sa prĂ©paration, il convient de le peler le plus finement possible car c’est son enveloppe extĂ©rieure qui concentre le plus les substances intĂ©ressantes.

Le curcuma : efficace comme 15 médicaments !

Dans une revue d’études conduite pour le journal Plantes & Bien-Être, le Dr Franck Gigon a comptabilisé 600 bonnes raisons de consommer du curcuma (pour n’en retenir que deux, il est un anti-inflammatoire et un anticancer reconnu).

Un « pedigree » qui conduit de nombreux spécialistes des plantes médicinales à considérer que le curcuma – à lui tout seul – est aussi efficace qu’une quinzaine de médicaments !!!

Toutefois, sous sa forme naturelle, cette Ă©pice est faiblement absorbĂ©e par notre tube digestif, si bien que ses bĂ©nĂ©fices ne sont vĂ©ritablement perceptibles qu’en prĂ©vention et peu en traitement des maladies chroniques, pour lesquelles des formes optimisĂ©es en complĂ©ment alimentaire sont plus appropriĂ©es.

Pour améliorer son absorption, il est conseillé de toujours cuisiner le curcuma dans un corps gras (huile, lait de coco, etc.)

Les myrtilles n’ont pas peur du froid

Les myrtilles sont de délicieuses baies riches en anthocyanines, des antioxydants végétaux qui possèdent de nombreuses vertus : protection de la vision, en particulier nocturne, baisse des niveaux de sucre sanguin [15]  [16] (favorise la bonne santé artérielle et la longévité en général) et amélioration de la concentration et de la mémoire si l’on en consomme quotidiennement [17].

Elles auraient aussi des effets bénéfiques pour ralentir la croissance des cellules cancéreuses [18]  [19].

Tout le monde ne trouve pas des myrtilles dans son jardin, surtout ceux qui vivent en ville, et c’est pourquoi on peut ĂŞtre tentĂ© d’en acheter surgelĂ©es. C’est une bonne idĂ©e car les recherches ont montrĂ© que la congĂ©lation n’altĂ©rait pas les propriĂ©tĂ©s ou la teneur en antioxydants des myrtilles, mĂŞme sur de longues pĂ©riodes [20]  [21].

Les anchois : des oméga-3 sans métaux lourds

Pour les personnes qui ne sont pas vĂ©gĂ©tariennes, les anchois sont un aliment de choix car ils reprĂ©sentent une source importante d’acides gras omĂ©ga-3 Ă  longues chaĂ®nes EPA et DHA (ceux qui offrent le plus de bĂ©nĂ©fices sur la santĂ©), tout en ayant des teneurs en mĂ©taux lourds particulièrement basses, ce qui n’est pas le cas d’autres poissons gras comme le saumon ou le thon.

Le vinaigre de cidre coupe la faim

Le vinaigre de cidre est très riche en acide acétique, ce qui lui confère ce goût si particulier mais aussi des bénéfices remarquables sur le contrôle du taux de sucre dans le sang.

En cas de diabète de type 2 il peut ainsi aider Ă  se soigner mais les personnes en bonne santĂ© en bĂ©nĂ©ficient Ă©galement. Le vinaigre de cidre agirait en provoquant une baisse importante de l’index glycĂ©mique du repas dans lequel il est intĂ©grĂ© [22]  [23].

Cette propriété lui permet donc aussi de rendre les repas plus rassasiants, et donc de faciliter la perte de poids [24]  [25].

Bien choisir ses noix de Grenoble

La noix de Grenoble craque sous la dent, puis se change en une pâte douce et délicieusement parfumée, chaude avec une pointe d’amertume…

Elle est bourrĂ©e d’antioxydants, contient toutes les vitamines rĂ©pertoriĂ©es Ă  l’exception de la vitamine B12, elle est très riche en magnĂ©sium, en manganèse et en zinc et, surtout, elle contient une quantitĂ© impressionnante d’acides gras omĂ©ga-3.

Elle est par ailleurs pauvre en glucides, plutôt riche en protéines, et contient beaucoup de fibres.

On ne sera pas Ă©tonnĂ© qu’elle soit recommandĂ©e contre les maladies cardiovasculaires : manger 4 noix par jour augmente le taux sanguin d’acide alpha-linolĂ©nique (un omĂ©ga-3), ce qui diminue le risque de dĂ©cès cardiaque de 50 % [26]. La noix de Grenoble fait partie intĂ©grante du rĂ©gime mĂ©diterranĂ©en.

Méfiez-vous cependant des noix vendues en cerneaux, dans des emballages transparents de mauvaise qualité : elles sont souvent rances, ce qui veut dire que les graisses polyinsaturées oméga-3 non seulement ont perdu leur intérêt pour la santé, mais sont même devenues des composés toxiques.

Les cerneaux de noix doivent idéalement être conservés sous vide, au frigo ou même au congélateur. Sans cela, ils ne se conservent que 7 jours.

La patate douce écrase la pomme de terre ()

Aliment traditionnel et populaire sur l’Ă®le d’Okinawa (l’endroit qui compte le plus centenaires et de supercentenaires au monde), la patate douce a des teneurs record en nutriments : deux patates de taille moyenne apportent 100 % des besoins journaliers en vitamine C, 400 % des besoins journaliers en pro-vitamine A et plus de la moitiĂ© des apports en vitamines B.

La patate douce est aussi très riche en fibres solubles qui renforcent la barrière intestinale et stabilisent le taux de sucre sanguin. Ces propriétés font de la patate douce un aliment qui renforce le système immunitaire, améliore la qualité de la peau et la protège efficacement des dégâts du soleil.

Chaque fois que vous le pouvez, privilégiez la patate douce par rapport à la pomme de terre : alors que la pomme de terre augmente fortement le sucre sanguin, la patate douce possède un index glycémique de 50, qui en fait un allié de votre ligne et un aliment intéressant dans le diabète.

Amicalement,

Florent Cavaler





[1] Chang AR, Lazo M, Appel LJ, Gutiérrez OM, Grams ME. High dietary phosphorus intake is associated with all-cause mortality: results from NHANES III. Am J ClinNutr. 2013 Nov 13.

[2] Wilson KM, Shui IM, Mucci LA, Giovannucci E. Calcium and phosphorus intake and prostate cancer risk: a 24-y follow-up study. Am J Clin Nutr. 2015 Jan;101(1):173-83.

[3] Ried K, Toben C, Fakler P. Effect of garlic on serum lipids: an updated meta-analysis. Nutr Rev. 2013 May;71(5):282-99.

[4] Ried K, Frank OR, Stocks NP, Fakler P, Sullivan T. Effect of garlic on blood pressure: a systematic review and meta-analysis. BMC Cardiovasc Disord. 2008 Jun 16;8:13.

[5] Nantz MP, Rowe CA, Muller CE, Creasy RA, Stanilka JM, Percival SS. Supplementation with aged garlic extract improves both NK and γδ-T cell function and reduces the severity of cold and flu symptoms: a randomized, double-blind, placebo-controlled nutrition intervention. Clin Nutr. 2012 Jun;31(3):337-44.

[6] Josling P. Preventing the common cold with a garlic supplement: a double-blind, placebo-controlled survey. Adv Ther. 2001 Jul-Aug;18(4):189-93.

[7] Amagase H, Petesch BL, Matsuura H, Kasuga S, Itakura Y. Intake of garlic and its bioactive components. J Nutr. 2001 Mar;131(3s):955S-62S.

[8] Higdon JV, Delage B, Williams DE, et al. Cruciferous Vegetables and Human Cancer Risk: Epidemiologic Evidence and Mechanistic Basis. Pharmacol Res. 2007 March; 55(3)

[9] Ambrosone CB, Tang L. Cruciferous vegetable intake and cancer prevention: role of nutrigenetics. Cancer Prev Res (Phila Pa). 2009 Apr;2(4):298-300. 2009.

[10] Angeloni C, Leoncini E, Malaguti M, et al. Modulation of phase II enzymes by sulforaphane: implications for its cardioprotective potential. J Agric Food Chem. 2009 Jun 24;57(12):5615-22. 2009.

[11] Moon JH, Nakata R, Oshima S, et al. Accumulation of quercetin conjugates in blood plasma after the short-term ingestion of onion by women. Am J Physiol Regul Integr Comp Physiol. 2000 Aug;279(2):R461-7. 2000.

[12] Wagner H, Dorsch W, Bayer T, et al. Antiasthmatic effects of onions: inhibition of 5-lipoxygenase and cyclooxygenase in vitro by thiosulfinates and « Cepaenes ». Prostaglandins Leukot Essent Fatty Acids. 1990 Jan;39(1):59-62. 1990.

[13] Wang L, Lee IM, Zhang SM, et al. Dietary intake of selected flavonols, flavones, and flavonoid-rich foods and risk of cancer in middle-aged and older women. Am J Clin Nutr. 2009 Mar;89(3):905-12. 2009.

[14] Melino S, Sabelli R and Paci M. Allyl sulfur compounds and cellular detoxification system: effects and perspectives in cancer therapy. Amino Acids. 2010 Mar 6.

[15] Basu A, Du M, Leyva MJ et al. Blueberries Decrease Cardiovascular Risk Factors in Obese Men and Women with Metabolic Syndrome. The Journal of Nutrition. Bethesda: Sep 2010. Vol. 140, Iss. 9; p. 1582-1587. 2010.

[16] Still AJ, Cash KC, Johnson WD et al. Bioactives in Blueberries Improve Insulin Sensitivity in Obese, Insulin-Resistant Men and Women. The Journal of Nutrition. Bethesda: Oct 2010. Vol. 140, Iss. 10; p. 1764-1768. 2010.

[17] Krikorian R, Shidler MD, Nash TA et al. Blueberry Supplementation Improves Memory in Older Adults. J Agric Food Chem. 2010 April 14; 58(7): 3996-4000. 2010.

[18] Mannal P, McDonald D and McFadden D. Pterostilbene and tamoxifen show an additive effect against breast cancer in vitro. Am J Surg. 2010 Nov;200(5):577-80. 2010.

[19] Paul S, DeCastro AJ, Lee HJ et al. Dietary intake of pterostilbene, a constituent of blueberries, inhibits the beta-catenin/p65 downstream signaling pathway and colon carcinogenesis in rats. Carcinogenesis. 2010 Jul;31(7):1272-8. Epub 2010 Jan 8. 2010.

[20] Lohachoompol V, Srzednicki G, and Craske J. The Change of Total Anthocyanins in Blueberries and Their Antioxidant Effect After Drying and Freezing. J Biomed Biotechnol. 2004 December 1; 2004(5)

[21] Sablani SS, Andrews PK, Davies NM et al. Effect of thermal treatments on phytochemicals in conventionally and organically grown berries. J Sci Food Agric. 2010 Apr 15;90(5):769-78. 2010.

[22] White AM, Johnston CS. Vinegar ingestion at bedtime moderates waking glucose concentrations in adults with well-controlled type 2 diabetes. Diabetes Care. 2007 Nov; 30:2814-2815.

[23] Johnston CS, Kim CM, Buller AJ. Vinegar improves insulin sensitivity to a high carbohydrate meal in subjects with insulin resistance or type 2 diabetes mellitus. Diabetes Care. 2004 Jan; 27:281-282.

[24] Kondo T, et al. Vinegar intake reduces body weight, body fat mass, and serum triglyceride levels in obese Japanese subjects. Biosci Biotechnol Biochem. 2009 Apr; 73(8): 1837-1843.

[25] Petsiou EI, Mitrou PI, et al. Effect and mechanisms of action of vinegar on glucose metabolism, lipid profile, and body weight. Oxford University Press Journals. 2014 Oct; 651-661.

[26] Wu L, Piotrowski K, Rau T, Waldmann E, Broedl UC, Demmelmair H, Koletzko B, Stark RG, Nagel JM, Mantzoros CS, Parhofer KG. Walnut-enriched diet reduces fasting non-HDL-cholesterol and apolipoprotein B in healthy Caucasian subjects: a randomized controlled cross-over clinical trial. Metabolism. 2014 Mar;63(3):382-91.

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